mercredi 13 novembre 2013

James H. WILLBANKS, The Battle of An Loc, Indiana University Press, 2005, 227 p.


Après avoir refait la fiche de l'ouvrage du général Lam Quang Thi qui donnait un point de vue sud-viêtnamien sur la bataille d'An Loc (1972), je reviens sur un "classique" à propos de cette même bataille, l'ouvrage de l'historien américain James H. Willbanks. Willbanks, ancien lieutenant-colonel de l'US Army devenu historien, a participé lui-même, en tant que conseiller auprès de l'armée sud-viêtnamienne, à la bataille. Il avait signé, en 1993, un premier papier pour Combat Studies Institute, sur la bataille d'An Loc. Après avoir écrit un ouvrage sur les dernières années de la guerre du Viêtnam et la viêtnamisation, Willbanks revient à la bataille d'An Loc en utilisant des sources américaines, sud-viêtnamiennes et surtout nord-viêtnamiennes, qui sont désormais davantage disponibles. On sent cependant à la lecture de l'introduction que Willbanks cherche surtout à insister sur la participation américaine à la bataille, celle des conseillers militaires et de l'aviation, essentiellement.

Le premier chapitre rappelle le développement de l'armée sud-viêtnamienne après le retrait américain, progressif, dès 1969. La situation de l'ARVN est peut-être vue sous un angle un peu trop optimiste, même si l'historien rappelle la débâcle de l'opération Lam Son 719 au Laos en février 1971 (mais a contrario valorise sans doute un peu trop l'incursion cambodgienne d'avril-mai 1970). Le retrait américain continue : en mars 1972, il ne reste plus que deux brigades au Sud-Viêtnam (3rd Brigade, 1st Cavalry Division à Bien Hoa et la 196th Light Infantry Brigade à Da Nang). Il reste aussi un peu plus de 5 000 conseillers auprès de l'armée sud-viêtnamienne. L'USAF maintient encore cependant plus d'une centaine d'appareils et l'US Navy dispose aussi de deux porte-avions dans le golfe du Tonkin. Au départ, Américains et Sud-Viêtnamiens ne croient pas à une offensive d'envergure en 1972, et ne s'y rallie qu'au printemps de cette même année : ils pensent que l'effort portera sur les deux zones tactiques du nord du pays (I et II) avec un effort moindre autour de Saïgon.
 

mardi 12 novembre 2013

Un soldat nord-viêtnamien dans la guerre : Tra Tranh, 3ème compagnie, 174ème régiment, division 316

Tra Tranh a été enrôlé par l'armée nord-viêtnamienne, comme tous les hommes âgés de 18 à 45 ans. Il a reçu un entraînement d'infanterie de base, et a appris à se servir des armes soviétiques ou chinoises. Au printemps 1965, sa compagnie est envoyée au Sud-Viêtnam via la piste Hô Chi Minh. D'avril à novembre, elle mène plusieurs combats sur les Hauts-Plateaux et dans les montagnes environnantes.

[Le sergent Tra Tranh fait partie de la 3ème compagnie, 174ème régiment de la division 316] Je suis né en 1939 dans une famille de Thaïs noirs dans un village près de Lai Chau. De toutes les minorités de la région, les Thaïs Noirs sont différents des Thaïs blancs ou rouges. Nous sommes appelés ainsi en raison de la couleur de peau et du vêtement des femmes. Nous habitons surtout dans les vallées des hautes terres du nord-ouest du Viêtnam et du nord-est du Laos. Notre parenté détermine notre statut. Quelques familles de mon village constituent l'élite politique et religieuse, d'autres fournissent les fermiers, les artisans, les soldats. Selon la tradition des Thaïs noirs, chaque homme est un soldat [... ] Les villages ont toujours fait face aux agressions extérieures et aux menaces étrangères, celles des Chinois, des Français ou des Japonais. Depuis longtemps, chaque village a son "groupe d'autodéfense" pour protéger les personnes et la terre. Le groupe entraîne les hommes, organise la défense du village, et envoie des volontaires ou des conscrits pour les forces armées nationales.

Fenêtre sur le Viêtnam : aidez à financer le projet du lycée Kerraoul de Paimpol !

Voici un beau projet qui cherche un petit coup de pouce financier. Une classe de Terminale du lycée Kerraoul de Paimpol suit, depuis la rentrée 2012, un accompagnement personnalisé, qui propose un échange de correspondance avec un lycée de Nha Trang, au Viêtnam. 

Les organisateurs du projet cherchent 2 000 euros pour compléter leur budget. Le voyage doit  avoir lieu début 2014 : il prévoit de se rendre à Nha Trang mais aussi à Vinh, plus au nord, et sur le site de Dien Bien Phu, dont le 60ème anniversaire sera fêté l'an prochain. Les 2 000 euros demandés sont en fait le reliquat restant pour assurer les dépenses courantes, d'autres organismes ayant pris en charge le gros des frais et les familles contribuant à hauteur de 500 euros, déjà.

Les objectifs du voyage sont multiples : culturels (échanges avec les correspondants viêtnamiens, etc), mémoriels (visite du site de Dien Bien Phu, appréhension de l'histoire viêtnamienne contemporaine), scientifiques (c'est à Nha Trang qu'a travaillé Yersin, qui a découvert le bacille de la peste ; la plupart des élèves sont en S). Tout simplement, c'est aussi une occasion d'ouverture pour ces élèves d'un lycée général, classé lycée des métiers "Sanitaire et social", mais également excentré et situé en milieu rural.

Un petit geste pour eux !

La page Facebook du projet : https://www.facebook.com/voyagevietnam2014

samedi 9 novembre 2013

Z comme... Zumwalt

Amiral de l'US Navy et commandant des unités de guerre fluviale entre 1968 et 1970. Né en 1920 à San Francisco, Zumwalt sort diplômé de l'académie navale d'Annapolis en 1942. Il combat à Guadalcanal et dans les Philippines. Il est aussi présent pendant la guerre de Corée et passe ensuite au Naval College et au National War College, avant de prendre le commandement, en 1959, du premier navire lance-missiles de la Navy, la frégate USS Dewey. En 1964, il assiste le secrétaire à la Marine Paul Nitze et se montre réticent devant l'escalade de l'engagement américain en Asie du Sud-Est. L'année suivante, il est le plus jeune contre-amiral de l'US Navy. En 1966, il prend la tête de la division d'analyse des systèmes.

En septembre 1968, on lui confie le commandement des forces navales américaines au Viêtnam et du Naval Advisory Group, un poste considéré comme une impasse puisque plutôt "brown water navy" en lieu et place de la "blue navy". Il est chargé d'empêcher le flot logistique communiste à travers le delta du Mékong et de passer le relais à la marine sud-viêtnamienne. Zumwalt s'attèle à la tâche avec énergie. Il amplifie l'opération Market Time en lançant des raids de petits navires contre les voies d'approvisionnement jusqu'au Cambodge (opération Giant Slingshot). Pour appuyer les opérations amphibie, il fournit des Landing Craft aux soldats de la 9th Infantry Division. Il crée le programme ACTO (Accelerated Turnover to the Vietnamese) pour faire avancer la viêtnamisation avec une coopération étroite entre Américains et Sud-Viêtnamiens, et montre l'exemple dans ses relations avec le chef de la marine sud-viêtnamienne, l'amiral Tran Van Chon. Zumwalt pousse aussi à l'utilisation de l'agent orange comme défoliant au Sud-Viêtnam.

Sa performance est si impressionnante qu'il est rappelé à Washington en avril 1970 pour devenir chef des opérations navales. Il est le plus jeune officier de l'histoire de la Navy à tenir ce rang avec le grade d'amiral. Il se met à nouveau  à la tâche pour la réforme du personnel et l'affrontement avec la flotte soviétique. En tant que chef des opérations navales, il ne perd pas de vue le Viêtnam : pendant l'offensive de Pâques 1972, il presse les autorités de procéder au minage du port de Haïphong. Il est très impliqué, en tant que citoyen, dans les efforts humanitaires reliés à la guerre du Viêtnam. Il obtient ainsi la relaxe de Tran Van Chon. Il est aussi le porte-parole des vétérans victimes des herbicides ; son fils est en effet décédé en 1988, à 42 ans, d'un cancer probablement entraîné par l'exposition à l'agent orange. Zumwalt lui-même est victime d'un cancer diagnostiqué en 1986. Il maintient cependant que sa décision d'utiliser l'agent orange dans le delta du Mékong a contribué à sauver de nombreuses vies. Il regrette seulement les effets induits sur les soldats et les marins américains. Il meurt en 2000.


Pour en savoir plus :


MALCOLM MUIR JR., "Zumwalt, Elmo Russell, Jr.", in Spencer C. TUCKER (éd.), THE ENCYCLOPEDIA OF THE VIETNAM WAR. A Political, Social, and Military History, Second Edition, ABC-Clio, 2011, p.1363-1364.

jeudi 7 novembre 2013

Y comme... Yankee Station

Un point des eaux internationales au large du Nord-Viêtnam, dans la mer de Chine. Yankee Station est le point d'ancrage de la Task Force 77 de la VIIth Fleet de l'US Navy, dont les pilotes mènent des frappes contre le Nord-Viêtnam. Les porte-avions contrôlent à la fois les eaux et projettent leurs appareils au-delà du rivage.

Les attaques visent les noeuds de voies ferrées ou les ponts. Entre 1965 et 1968, ces frappes sont inclues dans l'opération Rolling Thunder. Pour faciliter la tâche avec l'US Air Force, des périodes de bombardement des cibles sont attribuées à chaque branche. Mais la stratégie est difficile à coordonner et les Américains préfèrent finalement diviser le Nord-Viêtnam en zones géographiques, correspondant à des routes d'accès. La confusion est donc moins grande entre la Task Force 77 et la 7th Air Force, et chaque branche peut concentrer ses atouts sur les secteurs définis pour elle.

En parallèle à Yankee Station, Dixie Station, créée en mai 1965 au sud-ouest de Cam Ranh Bay, autorise les frappes sur le Sud-Viêtnam, le Laos et le Cambodge. Yankee Station, qui fait partie du fameux "Tonkin Gulf Yacht Club", permet de maintenir la suprématie aérienne de la Navy et de l'Air Force pendant la guerre du Viêtnam. Mais la permanence implique de maintenir sur zone 2 porte-avions à Yankee Station et 1 à Dixie Station : les bâtiments passent 80% du temps en mer, ce qui limite les repos et surtout la maintenance.


Pour en savoir plus :


J. Nathan CAMPBELL, "Yankee Station", in Spencer C. TUCKER (éd.), THE ENCYCLOPEDIA OF THE VIETNAM WAR. A Political, Social, and Military History, Second Edition, ABC-Clio, 2011, p.1355.